Les Iconodules, La question de l'image

du 16 octobre au 14 décembre 1992

Cette exposition réalisée en collaboration avec l'Association des Conservateurs de Haute-Normandie est présentée sur trois sites partenaires : le Musée des Beaux-Arts André Malraux, le Centre d'art contemporain Usine Fromage à Rouen et le Musée de l'Ancien Evêché à Evreux.
Les Iconodules, La question de l'image
DOSSIER DE PRESSE

" Les Iconodules, la question de l'image s'inscrit dans le débat esthétique et sociologique qu'ouvre la prééminence de l'image tant dans la communication quotidienne que dans les plus récentes manifestations artistiques. Plus qu'il n'y parait, comme dans les siècles précédents, l'image est là, dans toute l'histoire du XXe siècle, même dans ce qui, comme l'abstraction, peut sembler sa négation : dans le refus de figurer, dans la question de la représentation et de l'expression de l'artiste. Le choix de l'exposition est de présenter une coupe dans cette histoire par la sélection de quatorze artistes internationaux, dont six français, nés entre 1950 et 1960. La diversité des positions prises semble déjouer les pièges d'une nouvelle solution uniquement formelle et permettre de cerner les traits de ce retour à l'image.
 
Une image sans ingénuité
En cette fin du XXe siècle, le réel a confisqué l'image. Il semble, au travers de la télévision qu'il est impossible de ressentir le réel autrement que par son intermédiaire. Les nouveaux supports, inventés depuis la deuxième moitié du XIXe siècle : photographie, cinéma, vidéo, participent tous de l'image. Développant la rhétorique traditionnelle, la publicité démontre que convaincre, c'est faire image. La connaissance du montage, du cadrage, des effets spéciaux, entre autres, nous alerte : ces supports, dans leur efficacité même sont le lieu de toutes les manipulations, bien que les premiers essais photographiques et cinématographiques surtout aient été entourés de la stupeur d'un réel retrouvé. Dans le domaine scientifique, (l'espace, la biologie) l'image est aussi visualisation de ce qu'on ne voit pas. Face à cette diversité, l'image artistique peut-elle être icône et renvoyée à une univocité : celle de la représentation, du message, celle de son origine, de son auteur ?

La négation du voir
Le recours à une image identifiable dans l'art des années 80-90 aurait pu fonctionner comme un simple emprunt vis à vis d'un réel rempli d'images et redoubler la technique du ready-made qui joue du choc du quotidien et du domaine artistique. Il n'en est rien. De tous temps, l'image est ce qui a fait concevoir clairement : des vitraux, bible du pauvre de l'Abbé Suger à l'image de rhétorique, tournure verbale qui, par sa singularité, marque et convainc. En cela, elle se réfère au texte. Représentation en quête d'illusion, l'image-peinture a renvoyé longtemps au réel, à l'histoire : elle avait un garant. L'image n'est plus seulement peinture mais photographie, film, vidéo. Placée sous le signe du pluriel, par la multiplicité des tirages, du mouvement de l'image/seconde elle interroge l’adéquation et l'immédiateté de la représentation à son support. L'image devient ainsi un lieu ouvert à l'expérimentation de l'auteur mais aussi du spectateur, qui peut souvent s'y mouvoir physiquement comme sur une scène théâtrale. Il s'agit donc d'une image complexe qui, plus qu'une impression visuelle établit des relations de sens. L'image n'a pas de clef. Composition d'indices, souvent d'origine diverse et parfois dans une même oeuvre de techniques variées, elle est à interpréter par le spectateur. L'image est une production, pas une reproduction.

Cette image sans garantie développe deux gestes annonciateurs : celui de Mallarmé restituant le langage à l'espace dans "Jamais un coup de dé n'abolira le hasard", celui de Magritte qui sépare langage et image définitivement : "ceci n'est pas une pipe". L'image produit du sens, mais n'offre aucun système de contrôle. L'image est dense. Tout s'y trouve : image du passé, de guerre, de publicité, de vie quotidienne, architecture, propositions d'urbanisme, grands mythes de différentes cultures. Icône ou image ? Image, dirons-nous car si la première est translation vers un au-delà, la seconde assume, dans sa matérialité, la diversité de l'interprétation. "

14 artistes et 126 oeuvres
Catherin BEAUGRAND, Bruni CARBONNET, René DANIELS, FISCHILI-WEISS, Bernard FRIZE, Ludger GERDES, IFP, Annette LEMIEUX, Matt MULLICAN, Juan MUNOZ, Rob SCHOLTE, Patrick TOSANI, Rosemarie TROCKEL, Françoise VERGIER.

Commissariat :
Françoise Cohen, Conservateur du Musée des Beaux-Arts du Havre
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