Raoul Dufy, collection du musée des beaux-arts du Havre, musée des Beaux-Arts de Rouen

du 15 septembre 1997 au 15 février 1998

HORS LES MURS

Le Musée des Beaux-Arts de Rouen présente, du 15 septembre 1997 au 15 février 1998, une sélection de quinze peintures, dix dessins et cinq aquarelles de Raoul Dufy conservés dans la collection du Musée des Beaux-Arts du Havre, fermé pour réaménagement jusqu'en 1999. Cette sélection d'oeuvres permet de découvrir les principales recherches plastiques du peintre, du fauvisme à sa peinture dite "unitonale" à partir de 1946.
Raoul Dufy, collection du musée des beaux-arts du Havre, musée des Beaux-Arts de Rouen
DOSSIER DE PRESSE

"Célèbre pour ses aquarelles et ses décors monumentaux, Raoul Dufy, par sa nature heureuse et sa peinture pleine de sève, est souvent surnommé le peintre de la joie. Après une double formation à l'école municipale des Beaux-Arts du Havre et à l'école nationale supérieure des Beaux-Arts de Paris, Dufy est d'abord influencé par Eugène Boudin, également originaire du Havre. Les quatre premières aquarelles de l'artiste, datées de 1898, imprégnées des lecons académiques, et qui représentent des vues de ports et de paysages issus de sa région natale sont exposées ainsi que l'Autoportrait au chapeau mou, daté de la même année. La présentation de ces oeuvres de jeunesse constitue une véritable révélation et permet ainsi au public de voir comment l'artiste s'est progressivement affranchi de sa formation académique.

En effet Dufy ne demeure pas longtemps fidèle à cette veine impressionniste et prend rapidement conscience des limites d'une description du réel essentiellement visuelle et narrative.
Avant de découvrir le tableau de Matisse intitulé Luxe, calme et volupté, présenté au Salon des Indépendants en 1905, Dufy, réside brièvement à Martigues en 1903. Il est d'emblée séduit par la lumière cristalline du Sud de la France, qui va le mener irrémédiablement vers le fauvisme. La visite de l'exposition Signac à la galerie Druet en 1904 le conforte dans son goût pour la touche fractionnée déjà perçue dans la toile de Matisse.
 
Raoul DUFY (1877-1953), Baigneuse, cargo, voiliers et papillons, après 1925, huile sur toile, 129,5 x 102 cm. MuMa musée d'art moderne André Malraux, Le Havre, legs de Mme Raoul Dufy, 1963. © MuMa Le Havre / Florian Kleinefenn © ADAGP Paris 2019
Raoul DUFY (1877-1953), Baigneuse, cargo, voiliers et papillons, après 1925, huile sur toile, 129,5 x 102 cm. MuMa musée d'art moderne André Malraux, Le Havre, legs de Mme Raoul Dufy, 1963. © MuMa Le Havre / Florian Kleinefenn © ADAGP Paris 2019
Travaillant sur le motif avec ses amis Marquet et Friesz, Dufy peint des toiles fauves jusqu'en 1908. Le fauvisme de Dufy, sans doute sa période la plus passionnante, sera illustré par trois peintures de tout premier ordre : Les Gymnastes de 1905, La Sortie des régates au Havre de 1906 et enfin par une scène d'intérieur, Jeanne dans les fleurs de 1907 où le souvenir de la Fenêtre ouverte à Collioure de Matisse, présentée en 1905 au Salon d'Automne, est omniprésent.

En 1906, avec ses amis Braque et Friesz, Raoul Dufy fonde le cercle de l'Art moderne au Havre afin d'exposer, dans leur ville natale, les oeuvres représentatives de l'avant garde européenne. En 1908, le séjour à l'Estaque en compagnie de Georges Braque, qui a passé son enfance au Havre, marque le début du cubisme chez Dufy. Le goût pour les formes déconstruites, très structurées, le renoncement à une palette éclatante est renforcé par la visite de la rétrospective Cézanne au Salon d'Automne en 1907. A cette époque, les toiles de Braque et de Dufy sont difficilement identifiables. Cette période est également marquée par la rencontre avec André Lhote, peintre et théoricien du cubisme et Guillaume Apollinaire, principal défenseur de ce mouvement. Le cubisme cézannien de Dufy sera représenté par Le Vieux-port de Marseille et Notre-Dame de la Garde daté de 1908, Le Casino Marie-Christine et La Plage du Havre ainsi que par l'Entrée du port du Havre, tous deux datés de 1910.

Alors que Braque se rapproche de Picasso, Dufy abandonne le cubisme vers 1909 et se tourne vers un style différent. Lors d'un séjour à Munich avec le peintre Othon Friesz, lui aussi originaire du Havre, Dufy découvre la richesse et l'intérêt des arts appliqués exposés dans le cadre de la Deutscher Werkbund. C'est le début de sa collaboration avec le couturier Paul Poiret. L'approche orientale de la composition, autrement dit, le goût des motifs juxtaposés, le refus du vide, ne sera pas sans importance dans les peintures à venir de Dufy.
Après la guerre, Dufy séjourne fréquemment dans le Midi, notamment à Vence. Mais ses multiples déplacements le ramènent tout naturellement dans sa Normandie natale, dont la qualité de la lumière et les paysages maritimes constitueront toujours sa patrie intérieure. Les bords de la Méditerranée demeurent toutefois ses paysages de prédilection.

C'est au cours des années vingt que Dufy acquiert un style plus personnel qui s'exprime par un graphisme souple, des successions d'arabesques et de tracés légers ainsi qu'une couleur éclatante. Ces années de maturité sont aussi marquées par la pratique de plus en plus régulière de l'aquarelle, sa collaboration avec Artigas qui lui permet de concevoir des motifs pour des céramiques. Les sujets traités évoquent les loisirs collectifs telles que les célébrations nationales, les scènes en bord de mer, ou encore les baigneuses. C'est ainsi que l'œuvre de Dufy s'inscrit parfaitement dans le Paris de l'entre-deux-guerres alors dominé par le 'retour à l'ordre' qui se caractérise par un regain pour la figure, les maîtres anciens et les références nationales.
Cette période sera illustrée par plusieurs peintures dont la plus célèbre s'intitule La Plage et l'estacade au Havre de 1926-30.

En 1935, Dufy fait la connaissance de Jacques Maroger, un chimiste, qui met au point un pigment dont la substance permet à la lumière de pénétrer la couche Picturale. Bientôt Dufy aura essentiellement recours à ce procédé, dont la fluidité et la transparence satisfont pleinement l'attrait de l'artiste pour la luminosité. Puis cette décennie voit les commandes importantes pour l'exposition Internationale de Paris en 1937 (La Fée électricité, musée d'art moderne de la Ville de Paris), dont le sujet porte sur l'histoire de l'invention de l'électricité, les décors de la Singerie du Jarcin des Plantes ainsi qu'un panneau monumental pour le bar du nouveau théâtre du Palais de Chaillot intitulé Le Cours de la Seine (déposé au musée des Beaux-Arts de Rouen).

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Dufy se réfugie d'abord à Nice puis à Perpignan. Cette dernière période est évoquée avec un autoportrait de l'artiste daté de 1945 dont les couleurs franches et acides rappellent les premières recherches fauves de l'artiste ainsi que son admiration pour Van Gogh.

Ce parcours devra être complété par une visite des collections permanentes du musée. En effet, les liens entre le peintre originaire du Havre et le musée des Beaux-Arts de Rouen sont à rechercher dans l'histoire des collections. Dès 1909 la donation Depeaux fait entrer au musée de Rouen un ensemble de cinquante-trois peintures dites de 'plein air', parmi lesquelles une œuvre de Raoul Dufy, intitulée Sur la plage de Sainte-Adresse. En 1992, pour la réouverture du musée rénové, la première version du décor monumental conçue pour le bar du Palais de Chaillot, Le Cours de la Seine, déposée par le musée national d'Art moderne en 1978, est magnifiquement installée dans le jardin des sculptures. Cet immense panneau décoratif constitue un couronnement idéal à cette présentation essentiellement consacrée aux peintures de chevalet et aux arts graphiques de Raoul Dufy."

Commissariat :
Françoise Cohen, Conservatrice du musée des Beaux-Arts du Havre