Pissarro dans les ports

du 27 avril au 29 septembre 2013

En 1903, alors qu'il comptait retourner passer l'été à Dieppe, Pissarro, se laisse convaincre par le collectionneur havrais, Peter Van der Velde, de venir au Havre.
Pissarro au Havre, par Hélène Leroi
Camille PISSARRO (1831-1903), L'Anse des Pilotes et le brise-lames est, Le Havre, après-midi, temps ensoleillé, 1903, huile sur toile, 54,5 x 65,3 cm. © MuMa Le Havre / David Fogel
Camille PISSARRO (1831-1903), L'Anse des Pilotes et le brise-lames est, Le Havre, après-midi, temps ensoleillé, 1903, huile sur toile, 54,5 x 65,3 cm. © MuMa Le Havre / David Fogel
Pissarro s'installe à l'hôtel Continental, sur l'avant-port du Havre, « l'endroit le plus convenable, et peut-être le moins banal pour y faire quelques toiles », et d'où il dit « voir passer devant ma fenêtre toute la journée les grands steamers transatlantiques et autres du matin au soir, avec les docks, le trafic, c'est grandiose, je crois que je tiens une série nouvelle qui sera intéressante ». Des trois fenêtres de sa chambre, il embrasse largement le paysage portuaire : la jetée et le sémaphore vers l'ouest et le large, l'anse des pilotes devant lui, et le fond de l'avant-port vers l'est.
 
Camille PISSARRO (1831-1903), L'Anse des Pilotes, Le Havre, matin, soleil, marée montante, 1903, huile sur toile, 54,5 x 65 cm. © MuMa Le Havre / David Fogel
Camille PISSARRO (1831-1903), L'Anse des Pilotes, Le Havre, matin, soleil, marée montante, 1903, huile sur toile, 54,5 x 65 cm. © MuMa Le Havre / David Fogel
Pissarro, qui écrivait à son fils en arrivant au Havre : « Tu sais que les motifs sont tout à fait secondaires pour moi : ce que je considère, c'est l'atmosphère et les effets », trouve sans doute dans ce port largement ouvert sur l'océan, une variété d'effets propre à satisfaire son ambition. Toutefois, le motif n'est jamais insignifiant et au Havre, comme à Dieppe et à Rouen, l'animation du port avec son intense activité, le mouvement des hommes, pris individuellement ou collectivement, continuent d'être au cœur de ses préoccupations.
 
Camille PISSARRO (1831-1903), Entrée du port du Havre et le brise-lames ouest, soleil, matin, huile sur toile, 57,2 x 64,8 cm. © Memphis, Dixon Gallery & Gardens
Camille PISSARRO (1831-1903), Entrée du port du Havre et le brise-lames ouest, soleil, matin, huile sur toile, 57,2 x 64,8 cm. © Memphis, Dixon Gallery & Gardens
D'ailleurs, lorsque Pissarro s'installe au Havre, un grand chantier d'agrandissement de l'entrée du port vient de commencer (on voit les premières palissades installées pour délimiter et protéger l'aire en travaux dans Entrée du port du Havre et le brise-lames ouest, soleil matin, de Memphis) et l'artiste a conscience qu'il peint un port en pleine mutation. « J'attends un amateur qui désire voir mes motifs du port. Il paraît que c'est très important au point de vue historique et documentaire ! On est en train de démolir le port pour en construire un plus vaste, quand ce sera démoli ce sera, paraît-il, unique ! ».

Pissarro peint vingt-quatre toiles au Havre. Sa série terminée, il rentre à Paris le 26 septembre, tombe malade peu après, et s'éteint le 13 novembre 1903, âgé de soixante-treize ans. Ainsi, la série havraise referme-t-elle le cercle de toutes les séries de Pissarro.
Une semaine avant son départ, il reconnaissait « Je suis bien content d'être venu ici, c'est d'abord superbe et, ce qui ne gâte rien, j'ai fait quelques connaissances ici qui aiment ma peinture et qui achèteront à un moment donné ». Pissarro se réjouissait enfin d'entrevoir, à cette heure tardive de sa vie, la promesse d'un succès commercial tant désiré.