Trine Søndergaard - Still

du 13 octobre 2018 au 27 janvier 2019

L’exposition de Trine Søndergaard réunit au MuMa deux séries de photographies : « Interior » et « Guldnakke ».
Cet ensemble d’une trentaine de pièces sera enrichi par la présence d’un tableau du peintre Vilhelm Hammershøi, provenant des collections du musée d’Orsay, et dont l’oeuvre a inspiré la photographe danoise.
Le mot Still n’a pas d’équivalent littéral en français, il associe les notions de calme et de silence.
Trine Søndergaard - Still
Tout semblerait différencier ces deux séries « Interior » et « Guldnakke » : d’un côté le vide, l’absence de vie, le silence, une composition à tendance monochrome et marquée par des figures géométriques. De l’autre, une présence humaine, même si les visages ne sont pas visibles, l’éclat d’une matière, une palette de couleurs et une symphonie de tissus. Mais à y regarder de plus près, le travail exigeant sur la lumière qui éclaire les lieux et les corps, la rigueur de la composition, le rendu des matières et de la peau, rapprochent les photographies qui composent « Interior » et « Guldnakke », participant ainsi du style de Trine Søndergaard. Et par-delà leur sujet, cet ensemble est empreint de calme et de silence.

Interior
Sur une période de quatre ans, Trine Søndergaard réunit patiemment les images qui composent cette série. Se rendant dans les pièces de manoirs danois inhabités, elle choisit ces endroits pour développer une démarche artistique qui repose sur la précision et la sensibilité qu’elle exprime à l’aide du médium photographique, tout en explorant les limites de celui-ci ; de la plupart de ses travaux se dégage une impression de silence et d’un temps qui s’est arrêté. Les manoirs qu’elle photographie sont restés vides pendant un demi-siècle. Leurs pièces sont exemptes de toute trace de vie. Une relation avec l’atmosphère des tableaux du peintre danois Vilhelm Hammershøi est aisément perceptible à travers les nuances de gris et le rendu des lumières.

Guldnakke
Trine SØNDERGAARD (1972), Guldnakke #8, 2012, Tirage jet d’encres pigmentaires monté sur Dibond d’après négatif couleur, 150 x 150 cm. Courtesy MuMa / Martin Asbæk Gallery Copenhague, & Bruce Silverstein Gallery, New-York. © Trine Søndergaard © ADAGP, Paris, 2018
Trine SØNDERGAARD (1972), Guldnakke #8, 2012, Tirage jet d’encres pigmentaires monté sur Dibond d’après négatif couleur, 150 x 150 cm. Courtesy MuMa / Martin Asbæk Gallery Copenhague, & Bruce Silverstein Gallery, New-York. © Trine Søndergaard © ADAGP, Paris, 2018
« L’or est un symbole universel de richesse, incarnant le sublime ou le divin. L’or suscite un sentiment de désir chez beaucoup d’entre nous. Quand j’ai découvert dans un musée ces coiffes recouvertes d’or, j’ai été immédiatement fascinée par leur matière et leur broderie délicates, sans rien connaître de leur histoire. Les coiffes datent du milieu des années 1800 et elles étaient populaires chez les femmes des riches fermiers du Danemark. Les coiffes constituaient une marque d’appartenance à une classe sociale. Le fil d’or était précédemment réservé à la royauté, la noblesse et l’église ; ce sont des couturières très spécialisées qui en ont fait usage. Elles sont les premiers exemples de femmes indépendantes qui, par leur travail, ont su subvenir aux besoins de leur famille. La jonction de cette sorte d’histoire de femme à un vêtement spécifique est quelque chose que j’ai déjà exploré dans le passé, comme la possibilité de lire les traces des formes passées. » T.S.

Cette exposition est réalisée en collaboration avec la galerie Martin Asbæk, Copenhague, et avec le concours de l’Ambassade Royale de Danemark. Elle est la cinquième et dernière du cycle organisé en Normandie en 2018 par Lumières Nordiques. Après le MuMa, elle sera présentée en 2019 à la Maison du Danemark à Paris.

TRINE SØNDERGAARD

Trine Søndergaard est née en 1972 au Danemark. Elle vit et travaille à Copenhague. Elle a reçu le prix Albert Renger-Patzsch ainsi que de nombreuses bourses, en particulier de la Danish Arts Foundation qui lui a permis de mener un important travail pendant trois ans. Ses photographies ont fait l’objet d’expositions dans de nombreux pays et figurent dans les collections de grandes institutions publiques telles que le Musée des Beaux-Arts de Houston aux États-Unis, le MUSAC en Espagne, le Musée d’Art de Göteborg en Suède et la Maison Européenne de la Photographie en France. Elle a publié plusieurs livres édités par Steidl, Hatje Cantz, Hassla Books et FabrikBooks. En 2014, à l’occasion de deux expositions présentées au Pays de Galles et en Israël, Hatje Cantz édite l’ouvrage « Stasis » qui réunit entre autres des oeuvres extraites des deux séries « Interior » et « Guldnakke ». Trine Søndergaard a également exposé et publié des ouvrages en collaboration avec l’artiste danois Nicolai Howalt. Elle est représentée aujourd’hui par la galerie Martin Asbæk à Copenhague et la galerie Bruce Silverstein à New York.

À PROPOS DU PEINTRE VILHELM HAMMERSHØI
 
Vilhelm HAMMERSHØI (1864-1916), Intérieur, Strandgade, 30, 1904, huile sur toile, 55,5 x 46,4 cm. Paris, musée d’Orsay, donation Philippe Meyer, 2000. © RMN-Grand-Palais (musée d’Orsay) / Adrien Didierjean
Vilhelm HAMMERSHØI (1864-1916), Intérieur, Strandgade, 30, 1904, huile sur toile, 55,5 x 46,4 cm. Paris, musée d’Orsay, donation Philippe Meyer, 2000. © RMN-Grand-Palais (musée d’Orsay) / Adrien Didierjean
Les images de la série « Interior » de Trine Søndergaard font explicitement référence au peintre danois du XIXe siècle Vilhelm Hammershøi : ses tableaux sont connus pour leur harmonieuse palette de gris ainsi qu’une connaissance aiguë de la lumière et de son rendu. Tout comme le peintre, la photographe restitue la profondeur d’un couloir au-delà des portes et des fenêtres, suggérant un paysage extérieur plus lumineux, derrière les murs épais des bâtiments. Les oeuvres de Søndergaard font écho à la représentation magistrale de la lumière naturelle par Hammershøi, captant lentement et minutieusement les nuances sourdes du blanc de la poussière sur le blanc du mur, remettant ainsi en question nos idées sur l’instantanéité de la pratique photographique à l’ère du numérique. Vilhelm Hammershøi est né en 1864 à Copenhague où il meurt en 1916. L’oeuvre qu’il développe à contre-courant des mouvements artistiques de son époque est dominée par l’intérêt qu’il porte à l’architecture et aux intérieurs. Il attire la curiosité de l’écrivain Rainer Maria Rilke, qui publiera un essai sur son travail, et inspire le cinéaste Carl Theodor Dreyer. Il a fait l’objet d’une importante exposition au musée d’Orsay, à Paris, en 1997.

LUMIÈRES NORDIQUES, Un parcours photographique en Normandie
 
La manifestation Lumières Nordiques a été conçue comme une invitation à la découverte de la photographie nordique contemporaine, à travers un ensemble d’expositions d’oeuvres d’artistes développant une création inspirée par leur pays. Lumières Nordiques a mis en réseau plusieurs lieux prestigieux accueillant ces expositions en Normandie, au sein d’un territoire géographique qui se déploie le long de la Seine entre les villes de Rouen et du Havre. Chaque lieu impliqué dans ce projet présente un ou plusieurs artistes originaire(s) de l’un des cinq pays nordiques : successivement la Finlande à Jumièges (Logis abbatial de l’Abbaye), l’Islande sur les quais de Seine à Duclair, la Norvège à Saint-Pierre de Varengeville (Centre d’art contemporain de la Matmut), la Suède à Rouen (Musée des Beaux-Arts) et le Danemark au Havre (MuMa, Musée d’art moderne André Malraux).
Gabriel Bauret, commissaire général de Lumières Nordiques.

GENÈSE D’UN PROJET

L’idée de consacrer une manifestation à la scène photographique nordique est née d’un constat : la richesse de la création qui se manifeste actuellement dans les pays du nord, qu’il s’agisse de cinéma, de musique ou de littérature, et qui trouve en France un large écho. La question de l’existence d’un lien possible entre les photographes contemporains originaires de ces pays (Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède) a rapidement émergé, entraînant avec elle l’envie de développer un projet d’exposition qui semblait inédit en France : à l’instar des « Échappées Nordiques », exposition présentée au Musée des Beaux-arts de Lille en 2008 et qui réunissait des peintres finlandais et scandinaves, ou encore des « Lumières du Nord », exposition dédiée également à la peinture et organisée par le Petit Palais à Paris, en 1987. Quant au déploiement de la proposition sur plusieurs espaces en Normandie, celui-ci a très logiquement été envisagé autour de l’axe de la Seine, l’histoire d’une présence nordique ayant laissé quelques traces dans cette région. Quant au titre donné à cette manifestation, le choix de la « lumière » s’est imposé à double titre : parce que le mot photographie signifie étymologiquement écriture de la lumière, mais également parce que ce sont peut-être certaines lumières combinées à une présence particulière de la nature qui caractérisent la photographie nordique.

LE MUMA ET LUMIÈRES NORDIQUES

L’une des raisons qui a amené le MuMa à participer au cycle d’expositions consacré à la photographie nordique contemporaine
est liée à la présence dans les collections du musée d’une oeuvre de la série « Interior » de Trine Søndergaard. Développer cette série sur ses cimaises est une manière de donner une forme de prolongement à cette acquisition et de permettre à ses visiteurs de se familiariser avec une esthétique photographique propre aux pays du nord.

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