Le Théâtre de Jean Dubuffet

du 19 mai au 03 septembre 2001

Centenaire de la naissance de l’artiste au Havre le 31 juillet 1901

En 1935, Dubuffet réalise des masques et marionnettes en s’inspirant de ses proches. L’exposition présente certains de ces premiers essais et offre un parcours au travers de l’œuvre, de 1944 aux Mires et aux Non-lieux d’où toute présence humaine a disparu. L’exposition insiste particulièrement sur les séries de Paris-Circus, l’Hourloupe, le Théâtre de mémoire et présente un ensemble de praticables et de costumes du spectacle Coucou Bazar qui permet au public d’appréhender au sein du musée la dimension monumentale de l’œuvre.
Le Théâtre de Jean Dubuffet
Artiste multiforme, penseur infatigable, Jean Dubuffet a ouvert de nouveaux champs hors des conventions culturelles. En 1942, après plusieurs tentatives, alors qu’il a abandonné tout objectif autre que son pur plaisir, Dubuffet se remet à la peinture et découvre dans une figuration à l’allure populaire et outrancière l’expression de la vie à l’état brut qu’il recherchait.
L’homme, « l’homme du commun », auquel Dubuffet dédie son œuvre, est au centre de sa peinture, non comme dans l’art classique pour dominer l’univers mais comme l’un des accidents nés au sein de du chaos plein d’énergie qu’il décèle dans le spectacle des rues de Paris, la matière des champs et des routes ou qu’il crée dans le labyrinthe codé des couleurs et des tracés de L’Hourloupe.
Hommage rendu par sa ville natale à l’une des figures majeures de l’art du XXe siècle, l’exposition Dubuffet est le reflet de la pensée toujours en mouvement d’un artiste ouvert aux approches les plus insolites.

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Organisée à l'occasion du centenaire de la naissance de Jean Dubuffet au Havre le 31 juillet 1901, l'exposition au musée Malraux rassemble 72 oeuvres sur la représentation humaine, de 1935 à 1984. Deux ensembles la composent : une évocation de Coucou Bazar (1973) constituée de 16 praticables et costumes, et un parcours chronologique qui insiste sur les séries de Paris-Circus (1961-1962), de L'Hourloupe (1962-1974) et des Théâtres de mémoire (1975-1979). L'exposition se termine sur les Mires (1983-1984) et les Non-lieux (1984) d'où toute présence humaine a disparu.

Le théâtre est une des métaphores de l'œuvre qui revient fréquemment sous la plume de J. Dubuffet. Elle en suit l'évolution. Vers 1957, elle sert à souligner la simplification et l'outrance de la représentation. Dans les textes du milieu des années 70, le théâtre apparaît comme une scène mentale où s'insère le vivant. La maîtrise de la mise en scène trouve son équivalent dans l'évolution de l'oeuvre à partir de L'Hourloupe vers un art programmé où les techniques de collage et de transfert prennent le pas sur le geste direct de l'artiste.
Dans ses écrits, J. Dubuffet souligne deux tendances opposées de son oeuvre : un axe contemplatif qui le voit s'enfouir dans la matière et une représentation figurée du monde dont l'homme est le catalyseur. La culture classique a toujours placé l'homme au premier plan. Chez J. Dubuffet, il est aussi omniprésent mais apparaît au contraire comme un accident au sein d'un continuum organique.

Proche de Max Jacob, de Fernand Léger, d'André Masson entre 1921 et 1924, J. Dubuffet est hanté par la relation de l'art et de la vie. Déçu par l'avant-garde, il abandonne la peinture. En 1935, il réalise quelques masques, des marionnettes, des portraits d'après ses proches (Lili, marionnette à gaine et masque, 1936). En 1942, lorsqu'il se remet à peindre, J. Dubuffet trouve dans la « comédie » populaire des Marionnettes de la ville et de la campagne une approche libérée par rapport aux données en cours dans le monde artistique.
Cette découverte d'une figuration au dessin naïf, parfois caricatural, déformé, et aux couleurs vives fait écho à l'intérêt que porte J. Dubuffet aux productions de l'art brut qu'il rassemble à partir de 1945. Dès 1943, il positionne « l'homme du commun » au centre de sa peinture en sujet et en destinataire de l'ouvre. Dans le spectacle de la ville, son intérêt va aux matières des façades d'immeubles, des murs (Vue de Paris au chien, 1943). Par leur technique, dessin gratté dans l'épaisseur de la peinture, les Hautes pâtes (Conciliabule, 1945) et les Pâtes battues (Paysage à l'auto, 1953) rappellent les graffitis et illustrent cette transmutation du quotidien en scènes archétypales.

En 1961, après de longs mois d'expérimentation sur la matière à Vence, J. Dubuffet découvre le Paris moderne des trois Glorieuses. La série de Paris Circus montre le spectacle de la rue comme un chaos plein d'énergie et de couleurs où se mêlent inscriptions, voitures et devantures (Rue des PetitsChamps (Bombance), 1962).
Dès 1962, s'éloignant du réel, J. Dubuffet transcrit le rythme de la vie dans les principes graphiques : utilisation des hachures (Mouchon berloque, 1963), et du rouge et du bleu sur fond blanc (Dimanche urbain, 1967) qui caractérisent L'Hourloupe, où le vivant, le langage et la pensée se rejoignent. Le monde parallèle de L'Hourloupe trouve une de ses expressions les plus achevées dans le spectacle de Coucou Bazar. Plus qu'un véritable spectacle, J. Dubuffet le considère comme un tableau en mouvement où les acteurs entravés par leurs lourds costumes appartiennent au paysage mouvant où domine la réalité peinte de L'Hourloupe.

En 1975, J. Dubuffet souhaite revenir au réel. Les Théâtres de mémoire (Les données de l'instant, 1977) dont le nom vient d'un procédé de mémorisation issue de la rhétorique cicéronienne, développent la technique d'assemblage à partir de ses oeuvres expérimentée par le peintre dès 1952. Elle rend une pensée polyphonique, toujours en mouvement qui, pour J. Dubuffet, est le propre de la pensée créatrice dont l'origine se situe dans l'attention mouvante de l'homme du commun à son environnement.
A partir de 1981, J. Dubuffet s'oriente vers la notion de site représentant une transcription mentale des lieux réels. Le réseau graphique est un champ ouvert à tous les possibles, qui dans les Mires et les Non-lieux précèdent même l'apparition du vivant.

L'exposition organisée en collaboration avec la Fondation Dubuffet, a bénéficié du soutien du Ministère de la Culture et de la Communication - DRAC de Haute Normandie, du Conseil Régional de Haute-Normandie, du Conseil Général de la Seine-Maritime et de la Ville du Havre.
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