Gœneutte, Les Haleurs du Havre

En 2018, le MuMa a acquis, par voie de don de Madame Deloche de Noyelle, la gravure Les Haleurs du Havre, la paye, exécutée par Eugène Gaujan d’après une peinture de Norbert Gœneutte (1854-1894). Ce don de Madame Deloche de Noyelle a retenu l’attention du musée puisqu’il représente un sujet havrais en lien avec ses collections permanentes. C’est  la seconde œuvre de Gœneutte à entrer dans les collections du MuMa. Un pastel de l’artiste, intitulé Femme Nue faisait en effet partie du legs du collectionneur Charles-Auguste Marande qui a vu entrer dans les collections du musée en 1936 près de 90 œuvres impressionnistes et modernes. 
GŒNEUTTE Norbert (1854-1894), Les Haleurs du Havre, la paye, 1882, gravure. MuMa musée d'art moderne André Malraux, Le Havre, don de Madame Deloche de Noyelle, 2018. © 2018 MuMa Le Havre / Charles Maslard
GŒNEUTTE Norbert (1854-1894), Les Haleurs du Havre, la paye, 1882, gravure. MuMa musée d'art moderne André Malraux, Le Havre, don de Madame Deloche de Noyelle, 2018. © 2018 MuMa Le Havre / Charles Maslard
Dans les ports maritimes et quand les navires étaient à voiles, les hâleurs étaient des travailleurs journaliers associés aux fonctions des pilotes et des lamaneurs. Souvent anciens marins ils avaient pour fonction, quand il n’y avait pas assez de vent où lorsqu’ils étaient contraires, de tirer depuis les quais les navires à l’aide des aussières pour le mener dans son bassin et pour aider aux manœuvres de retournement et d’amarrage. La scène les montre s’avançant à tour de rôle devant le bureau du Maître-Hâleur où va leur être remis leur paye du jour.

Le peintre de Marine havrais Adolphe Carbon-Bonquart a décrit ainsi le travail des hâleurs du port du Havre dans la revue Journal des voyages et des aventures de terre et de mer du 26 mars 1899:
Le pavillon blanc à croix noire a signalé « Pleine mer » : le trois-mâts, le cap sur le port, parcourt la dernière étape de son long voyage. Une à une, ses voiles tombent ; on pèse les cargues, puis, en haut le monde pour ferler la toile ; les ancres sont au mouillage, pendues sur l’itague des mouilleurs.
Un canot du port accoste à l’avant et prend l’aussière de remorque, qui porte à l’estacade où sont rassemblés les hâleurs. On envoie un bout que le patron du canot frappe sur l’aussière et « Hale à terre ! hale ! ». Les mathurins embraquent à courir, puis, chaque homme s’espace, croche dans le filin mouillé et le halage commence, rythmé par le sifflet du maître hâleur – « De long ! de long ! z’enfants ! »
Des fois, un vieux entonne une chanson que les autres reprennent en chœur au refrain. (…)
Ah dame ! c’est dur, le vieux trois-mâts a le ventre plein : gaïac, campêche, coton ou guano.


Artiste peintre, illustrateur et graveur français Norbert Gœneutte est un artiste encore peu connu en France alors qu’il est apprécié dans d’autres pays comme l’Angleterre, la Suisse ou l’Allemagne. Né à Paris en 1854, il se forme à l'École des beaux-arts de Paris dans l’atelier d’Isidore Pils. Installé à Montmartre, il se lie d’amitié avec Auguste Renoir (qui le fait poser pour son Bal du moulin de la Galette), Camille Pissarro, Edouard Manet, Edgar Degas et George Rivière, ainsi que le peintre et graveur Marcellin Desboutin qui l’initie aux techniques de la gravure. Peintre, dessinateur, pastelliste et grand graveur, Gœneutte est surtout connu pour ses vues de villes et de ports ainsi que pour ses scènes de la vie urbaine et populaire.

En 1878, Gœneutte rencontre le collectionneur Hippolyte Fortin qu’il accompagne dans ses voyages, en particulier en Normandie en 1881 et 1882. C’est probablement au cours de ces périples que Gœneutte séjourne au Havre qu’il représente ensuite dans quelques œuvres dont les tableaux Les Haleurs au Havre, la paye, présenté au salon de 1883 (n° 1071) actuellement non localisée, qui a servi de source à cette gravure ainsi qu’un autre tableau conservé dans une collection particulière, Sur la Jetée, le Havre.

Atteint de tuberculose, Gœneutte s’installe à Auvers-sur-Oise en 1891, où il rencontre Charles-François Daubigny. Il s’éteint trois ans plus tard, à l’âge de quarante ans.
 
Raoul DUFY (1877-1953), Fin de journée au Havre, 1901, huile sur toile, 99  x 135 cm. MuMa musée d'art moderne André Malraux, Le Havre,achat avec l’aide du Fonds régional d’acquisition pour les musées (FRAM) de Normandie et de l'Association des Amis du musée André Malraux, 2012. © MuMa Le Havre / David Fogel — © ADAGP, Paris, 2014
Raoul DUFY (1877-1953), Fin de journée au Havre, 1901, huile sur toile, 99  x 135 cm. MuMa musée d'art moderne André Malraux, Le Havre,achat avec l’aide du Fonds régional d’acquisition pour les musées (FRAM) de Normandie et de l'Association des Amis du musée André Malraux, 2012. © MuMa Le Havre / David Fogel — © ADAGP, Paris, 2014
Les Haleurs au Havre, la paye, vient rejoindre au MuMa une autre œuvre mettant en scène des ouvriers du port : Fin de journée au Havre (1901), peinte par Raoul Dufy en 1901 et présentée au Salon des artistes français la même année.

Œuvres acquises en 2018 (2)

GŒNEUTTE Norbert (1854-1894), Les Haleurs du Havre, la paye, 1882, gravure. MuMa musée d'art moderne André Malraux, Le Havre, don de Madame Deloche de Noyelle, 2018. © 2018 MuMa Le Havre / Charles Maslard
Reynold ARNOULD (1919-1980), Portrait de mon maître Jacques-Emile Blanche, 1933, huile sur toile contrecollée sur carton, 45,8 x 37,7 cm (avec cadre). MuMa musée d'art moderne André Malraux, Le Havre, achat de la ville, 2018. © 2019 MuMa Le Havre / Charles Maslard