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Jack Smith, The Yellow Sequence, 1963-1965, détail © Courtesy of Jack Smith Archive and Gladstone Gallery, New York and Brussels
Jack Smith, The Yellow Sequence, 1963-1965, détail © Courtesy of Jack Smith Archive and Gladstone Gallery, New York and Brussels
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Peut-on considérer un film un texte ? Après tout – l’étymologie nous l’apprend – le mot volumen, issu du latin volvo, renvoie au geste qui consiste à envelopper. Le papyrus ne serait pas loin d’une bobine de film.
De cette observation, résolument matérielle, on peut instituer un parallèle entre les deux supports. Mais qu’en est-il de cet objet si spécifique, le « film d’artiste » (ou encore le « film expérimental ») ? Présentés souvent sous des configurations multiples, variables, autrefois soumis à des manipulations d’auteur, les films d’artistes apparaissent comme des textes résolument instables. En s’emparant de quelques notions de la philologie littéraire, cette présentation se propose de revenir, à travers une série d’exemples (Jack Smith, Wallace Berman, Barbara Rubin), sur les modes d’existence de ces œuvres à la trajectoire singulière, afin d’interroger leur possible transmission au futur.
 
Rencontre avec Enrico Camporesi, boursier postdoctoral de la Terra Foundation à l’Institut national d’histoire de l’art à Paris. Il a conçu et organisé des programmations film/vidéo et des expositions en France et à l’international. Il est l’auteur de Futurs de l’obsolescence, un essai sur la restauration du film d’artiste (à paraître en 2018 aux Éditions Mimésis).

Programme :
Jack Smith, The Yellow Sequence, 1963-1965, 16 mm, coul., son sur fichier num., 15’. Distribution : Light Cone, Paris
Wallace Berman, Aleph, 1956-1966, 16 mm, coul./nb, sil., 7’30. Distribution : LUX, Londres

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Esther Urlus, Konrad & Kurfurst, 2013-2014, dist. Light Cone
Esther Urlus, Konrad & Kurfurst, 2013-2014, dist. Light Cone
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Une fois par mois, d'octobre à mai, le MuMa invite le public à explorer le vaste territoire de l'image en mouvement (cinéma de recherche, expérimental, art vidéo, animation, documentaire...) avec MuMaBoX.

Ces visions subaquatiques vous sont proposées comme un prélude à l’exposition Né(e)s de l’écume et des rêves qui se tiendra au MuMa du 5 mai au 9 septembre 2018.
Visions oniriques où d’indistinctes présences apparaissent à travers le voile du rêve, insaisissables objets dérobés au désir (L’Étoile de mer, Alleluia).
Images remontées des profondeurs de l’Histoire, comme ces archives repêchées, sauvées de l’oubli, réanimées par le geste créateur qui les plonge dans l’eau de Javel (La Pêche miraculeuse) ou le bain primitif de la photochimie (Konrad & Kurfurst).
Vues macroscopiques de la faune sous-marine (Oursins) à travers l’objectif de la caméra du génial Jean Painlevé, pionnier du cinéma scientifique, amoureux de la mer et fondateur en 1934 du Club des Sous l’Eau, premier club de plongée sous-marine.
 
Programme :
Man Ray, L’Étoile de mer, 1928, 18’
Christophe Guérin, Alleluia, 2004, 9’
Cécile Fontaine, La Pêche miraculeuse, 1995, 10’
Esther Urlus, Konrad & Kurfurst, 2013-2014, 7’
Jean Painlevé, Oursins, 1954, 11’
Guillaume Meigneux, Habitations légèrement modifiées, 2015, dist. Cellulo Prod
Guillaume Meigneux, Habitations légèrement modifiées, 2015, dist. Cellulo Prod
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Une fois par mois, d'octobre à mai, le MuMa invite le public à explorer le vaste territoire de l'image en mouvement (cinéma de recherche, expérimental, art vidéo, animation, documentaire...) avec MuMaBoX.

« Architecte DPLG, je m’intéresse depuis quelques années à la mise en image de problématiques spatiales et de leurs répercussions sur l’homme et son quotidien. Quels liens et quelles expériences nous relient à nos espaces de vie ? Comment ces derniers nous conditionnent-ils et à l’inverse comment les exploitons-nous au-delà du schème fonctionnel pour lequel ils ont été conçus ?
Habitations Légèrement Modifiées est un film qui me permet de dévoiler ce qui résiste à la perturbation, ce qui persiste au-delà du changement. Dévoiler, c’est-à-dire retirer de « la vie de tous les jours » ce que le temps et l’habitude déposent pour en extraire l’essence. Un film sur le quotidien immuable pris dans l’impermanence des choses. Il ne s’agit pas d’un film sur l’architecture, mais d’un film d’architecture, dans le sens où le réel sujet du film n’est ni le projet, ni les architectes, mais l’espace en transformation et son influence sur la vie des habitants. » Guillaume Meigneux
 
Programme :
Guillaume Meigneux, Habitations légèrement modifiées, 2013, 76’

En écho au Mois de l’architecture contemporaine en Normandie
Sergei Eisenstein’s Mexican footage, 1931, dist. Light Cone
Sergei Eisenstein’s Mexican footage, 1931, dist. Light Cone
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Une fois par mois, d'octobre à mai, le MuMa invite le public à explorer le vaste territoire de l'image en mouvement (cinéma de recherche, expérimental, art vidéo, animation, documentaire...) avec MuMaBoX.

Ces histoires de masques commencent par la visite nocturne du Musée National d’ethnologie aux Pays-Bas filmée par Max de Haas en 1950 dans Maskerage, impeccable sur sa forme (première musique de film de Pierre Schaeffer), discutable sur le fond (relents colonialistes) et s’achèvent par les images sublimes tournées au Mexique par Eisenstein pendant le Jour des Morts.
Entre ces deux regards portés sur le masque, que tout oppose, quelques incarnations, simulacres et dissimulations, jeux plus ou moins sérieux où se mêlent exhibition, grotesque et violence primitive.
« Le mystère attirant et répulsif du masque, qui pourra jamais en donner la technique, en expliquer les motifs et démontrer logiquement l’impérieux besoin auquel cèdent, à des jours déterminés, certains êtres, de se grimer, de se déguiser, de changer d’identité, de cesser d’être ce qu’ils sont ; en un mot, de s’évader d’eux-mêmes. » Jean Lorrain, Histoires de Masques
 
Programme :
Max de Haas, Maskerage, 1951, 10’
Ben Russell, Trypps #6 (Malobi), 2009, 12’
Christian Boltanski, L’homme qui lèche, 1969, 2’30 et L’homme qui tousse, 1969, 3’30
Christopher Cogan, No moon, 2014, 10’
Anja Czioska, In the grass, 1992, 2’30
Martha Colburn, Secrets of mexuality, 2003, 5’
Grigory Alexandrov & Sergei Eisenstein & Edward Tissé, Sergei Eisenstein’s mexican footage, 1931, 10’15
Peter Delpeut, Lyrisch Nitraat, 1990, dist. Light Cone
Peter Delpeut, Lyrisch Nitraat, 1990, dist. Light Cone
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Une fois par mois, d'octobre à mai, le MuMa invite le public à explorer le vaste territoire de l'image en mouvement (cinéma de recherche, expérimental, art vidéo, animation, documentaire...) avec MuMaBoX.

Lyrisch Nitraat est une évocation de l’histoire du cinéma, plus émotionnelle que didactique, faite de mélodrames, de romances et de lyrisme. Deux lignes thématiques s’y dessinent: l’obsession du regard et de la mort, la matérialité éphémère de la pellicule. Plus qu’une œuvre nostalgique,
Lyrisch Nitraat est une invitation à voir ce matériel filmique ancien et à en faire un usage nouveau. La décomposition chimique du nitrate a laissé des traces irréversibles, mais la maîtrise du cadrage, de la mise en scène, de la couleur, de la lumière, du jeu des acteurs, dont font montre ces pionniers du cinéma, est source de plaisir.
Les fragments de films utilisés dans Lyrisch Nitraat proviennent tous de la collection de Jean Desmet (1875-1956), un des premiers distributeurs de films hollandais, qui comprend des films, fictions ou documentaires, européens et américains. À la mort de Desmet, sa collection a été léguée au Nederlands Filmmuseum.
 
Programme :
Peter Delpeut, Lyrisch Nitraat, 1990, 50’
Maki Satake, Vestige of life, 2008-2009, dist. Light Cone
Maki Satake, Vestige of life, 2008-2009, dist. Light Cone
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Une fois par mois, d'octobre à mai, le MuMa invite le public à explorer le vaste territoire de l'image en mouvement (cinéma de recherche, expérimental, art vidéo, animation, documentaire...) avec MuMaBoX.

Ce programme sera consacré à la mémoire, telle qu’elle peut être convoquée au vu des objets, des images, des vestiges de la vie vécue dans lesquels le temps enfuit semble capturé.
Jonas Mekas revisite le Williamsburg de sa jeunesse, celui de ses premiers pas de cinéaste ; Maki Satake revient dans la maison désertée de ses grands-parents, qui semblent pourtant présents grâce aux archives de l’artiste. Le film devient alors l’espace de la jointure entre passé et présent mais aussi celui de la mémoire des lieux et des êtres. John Smith évoque ainsi son père dans un registre volontiers ironique alors que Barbara Meter réanime avec lyrisme ses photographies de famille. Enfin, à partir de found footage, Jay Rosenblatt nous propose un récit universel que nous partageons au-delà de nos singularités : celui du temps de la vie qui s’écoule de la naissance à la mort.
 
Programme :
Jonas Mekas, Williamsburg, Brooklyn, 2003, 15’
Barbara Meter, Appearances, 2000, 18’
Maki Satake, Vestige of life, 2008-2009, 12’
John Smith, Dad’s Stick, 2012, 4’ 53
Jay Rosenblatt, The D Train, 2010-2011, 4’ 45
Leïla Férault-Levy, Luce, à propos de Jean Vigo, 2016, dist. La Huit
Leïla Férault-Levy, Luce, à propos de Jean Vigo, 2016, dist. La Huit
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Une fois par mois, d'octobre à mai, le MuMa invite le public à explorer le vaste territoire de l'image en mouvement (cinéma de recherche, expérimental, art vidéo, animation, documentaire...) avec MuMaBoX.

« Le temps d’une journée, Luce Vigo ouvre pour la première fois à son fils la malle aux archives de ses parents, morts quand elle était enfant. Les mots de Luce retracent la vie de cinéma de Jean Vigo et de ceux qui l’accompagnaient : Stork, Kaufman, Dulac ou Painlevé. De cet héritage, Luce n’en comprit le poids terrible qu’à l’âge de 14 ans. Et elle qui devint ensuite mère et enseignante réussit à en tirer – par la force – une seconde vie de cinéma : la sienne. Une vie passée à défendre les films, à les montrer. »  Vincent Poli, Catalogue FID 2017
« Luce me présente son fils, je lui parle du projet de film, d’ouvrir la malle et là, j’ai vu ses yeux briller et il m’a dit : « Ah oui, la malle va s’ouvrir… » Quelle chance ! » Leïla Férault-Lévy
 
Programme :
Leïla Férault-Levy, Luce, à propos de Jean Vigo, 2016, 67’
En présence de la réalisatrice

Dans le cadre du Mois du film documentaire en partenariat avec Lire au Havre, la bibliothèque et le service culturel de l’université du Havre, le festival Du Grain à démoudre, l’association Cannibale Peluche et le Pôle Image Haute- Normandie
Ado Arrietta, Les Intrigues de Sylvia Couski, 1974, dist. Capricci
Ado Arrietta, Les Intrigues de Sylvia Couski, 1974, dist. Capricci
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Une fois par mois, d'octobre à mai, le MuMa invite le public à explorer le vaste territoire de l'image en mouvement (cinéma de recherche, expérimental, art vidéo, animation, documentaire...) avec MuMaBoX.

Dans le sillage de Mai 68, Adolpho Arrietta devient le premier cinéaste underground. Son univers de conte de fées se peuple de nouveaux anges : ses amis travestis, les Gazolines dont Marie France, seront les héroïnes des Intrigues de Sylvia Couski. Les thèmes du cinéma d’Arrietta se précisent : des artistes rêvent de devenir à leur tour des œuvres d’art, le corps est envisagé comme le site d’une nouvelle création, l’identité est inventée de toutes pièces.
« Avec Les Intrigues de Sylvia Couski, c’est un Arrietta transfiguré qui surgit de son cocon. Le Paris artiste, à mi-chemin de Hollywood-Babylone et des naïades de tous sexes de la Factory warholienne, y célèbre ses rites, se déguise, se grime, et laisse poindre de-ci de-là, lorsqu’un rimmel coule sur un visage ou qu’une star déambule seule dans un parc, des effluves d’angoisse. Jamais Paris n’avait été ainsi filmé, jamais un tel luxe de paillettes, de strass n’illumina la morosité de ses façades. » Raphaël Bassan

Programme :
Ado Arrietta, Les intrigues de Sylvia Couski, 1974, 71’
Tales of a Sea Cow . © Etienne de France 2012
Tales of a Sea Cow . © Etienne de France 2012
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Rencontre avec Bidhan Jacobs

Bidhan Jacobs
est Docteur en études cinématographiques, chercheur postdoctoral au Labex Arts-H2H, Paris 8 - ENSLL et enseignant à Paris-Est Marne-la-Vallée et Paris 3 Sorbonne-Nouvelle. Il est l’auteur d’une thèse à paraître aux Presses Universitaires du Septentrion sous le titre Esthétique du signal, et codirecteur avec Nicole Brenez du Cinéma critique.
De l’argentique au numérique, voies et formes de l’objection visuelle (Presses de la Sorbonne, 2010)
 
Le signal est l’essence même du son et de l’image numérique : de l’information matérielle invisible à l’œil nu, codifiée et circulant à travers les technologies filmiques de l’âge du Web. Son accès, d’une importance capitale, est en mode protégé (Friedrich Kittler). D’un côté les outils numériques sont construits comme des boîtes noires au cœur desquelles le traitement du signal est soigneusement rendu opaque et inaccessible. De l’autre, les entreprises privées et les services d’intelligence des gouvernements disposent d’une puissance technologique illimitée d’interception et d’investigation des signaux pour mener leurs opérations de surveillance et de profilage à l’échelle planétaire. Récusant ce paradoxe, certains artistes tels Pierre-Yves Cruaud, HC Gilje, Paolo Gioli, Gaëlle Cintré, Jacques Perconte, Leighton Pierce, Joost Rekveld, Sadia Sadia, Jérôme Schlomoff, développent l’intelligence du signal : ils passent ainsi de son traitement régulé selon des normes audiovisuelles à son expérimentation pour en libérer les ressources plastiques inexploitées et exprimer toutes les strates de sensibilité de l’artiste.
 
David Bryant & Karl Lemieux, Quiet Zone, 2014. © David Bryant & Karl Lemieux
David Bryant & Karl Lemieux, Quiet Zone, 2014. © David Bryant & Karl Lemieux
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Bien que les films qui composent ce programme donnent à voir des mondes tout à fait réels, ils pourraient être autant de chapitres d’une fiction dystopique, autant de visions d’une planète en perdition : nature fantasmée, envahissante, post-apocalyptique (Wayward fronds), nature saccagée (Le Pays dévasté), humains exilés, contraints de trouver refuge dans des zones de silence radio (Quiet Zone), paysage désolé, ruines sinistres et inquiétantes d’une ancienne station radar (Cobra Mist). Enfin, une Gotham City lugubre disparaît dans un ultime cataclysme (Black Rain White Scars) qui n’est pas sans rappeler La Tempête de William Shakespeare dont s’inspira Aldous Huxley pour le titre de son roman Brave New World (Le Meilleur des Mondes).
Il s’agit pourtant de la réalité de notre monde contemporain dans lequel l’espèce humaine semble créer les conditions de sa propre disparition.


Fern Silva, Wayward Fronds, 2014, 13’15
Emmanuel Lefrant, Le Pays dévasté, 2015, 11’30
David Bryant & Karl Lemieux, Quiet Zone, 2014, 14’
Emily Richardson, Cobra Mist, 2008, 7’
Lukas Marxt, Black Rain White Scars, 2014, 9’
 

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