Genèse d'une exposition itinérante au Japon

L’exposition « L’estuaire de la Seine, l’invention d’un paysage » trouve son origine dans le souhait exprimé par plusieurs musées japonais et coréens de présenter un événement autour de la Normandie et de l’impressionnisme. Connu pour ses collections et son histoire particulière, le MuMa a donc été approché pour mener à bien ce projet.
De rencontres (au Havre) en échanges, celui-ci a évolué pour embrasser une histoire plus large, mais aussi un périmètre plus réduit. L'idée finalement proposée a été de raconter comment l'image de la Normandie s'est « construite » au fil du temps, puis diffusée largement, grâce aux œuvres d'artistes venus dans cette région à partir du XIXe siècle.

L'estuaire, c'est-à-dire la partie inférieure d'un fleuve qui est remontée par la marée deux fois par jour, est une notion assez « exotique » pour les habitants du Japon, île volcanique, montagneuse où les fleuves se jettent rapidement dans la mer. Raconter donc comment et pourquoi l'estuaire de la Seine, compris entre Rouen et Le Havre/Honfleur, a attiré les artistes est devenu le fil directeur de l'exposition.

L'estuaire de la Seine offre une combinaison de sites historiques, vestiges d'un passé qui remonte au Moyen-âge, de campagnes fertiles, de villes à l'activité florissante et industrielle, et d'un paysage maritime, le tout baigné d'une lumière que l'on dit à nulle autre pareille... la lumière des estuaires.

L'intérêt des peintres, sous l'influence d'artistes anglais comme Turner, se portera d'abord sur les sites « pittoresques », le patrimoine architectural (les églises gothiques, les monuments ruinés, les châteaux...), avant de s'attacher à la nature et à ses effets les plus changeants, puis à la vie moderne. L'exposition parcourt près d'un siècle et demi, des années 1820 au début des années 1950 et montre comment cette région se révèle et s'impose petit à petit comme un foyer artistique de première importance. Romantiques, tenants de la « Nouvelle peinture », impressionnistes, pionniers de la photographie, fauves sont venus chercher ici quelque chose de particulier. L'exposition mêle des personnalités très connues, d'autres moins.

Certains artistes se distinguent par un attachement de toute une vie à ce paysage comme Eugène Boudin et Raoul Dufy ; d'autres y passeront et reviendront, comme Félix Vallotton qui prendra ses quartiers d'été vingt années durant à Honfleur. Ce paysage aura eu le temps de changer, et même d'être bouleversé par la guerre, comme Le Havre, profondément meurtri par les bombardements. Pour autant, un artiste comme Dufy restera attaché à ce paysage de son enfance et de ses expériences artistiques et le peindra, comme inchangé, dans les dernières années de sa vie, alors qu'il en est éloigné pour des raisons de santé. Et l'histoire ne s'arrête pas avec Dufy, mais se poursuit. Simplement, les artistes ne sortent plus « sur le motif » avec leur chevalet et leurs pinceaux, mais désormais avec des appareils photographiques et des caméras. C'est pourquoi l'exposition s'achève avec le regard contemporain d'Olivier Mériel, comme une suite de cette longue histoire de l'art.

L'exposition réunit 137 œuvres dont, 86 peintures, 16 gravures et 35 photographies. Toutes proviennent de collections publiques françaises à l'exception de deux collections privées. Parmi les prêteurs, onze musées normands ont participé à cette mise en valeur de notre patrimoine artistique régional. Car si le but est de faire mieux connaître la Normandie par les œuvres qu'elle a inspirées aux artistes, notre souhait est bien de donner à ce public amoureux de notre région, l'envie de venir jusqu'aux bords de la Seine, visiter nos musées qui offrent un panorama plus complet de cette histoire passionnante.
Billet de blog du vendredi 12 septembre 2014

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